Bellaque matribus detestata …
A moins de vivre complètement à l’écart des nouvelles technologies, il devient difficile, pour ne pas dire impossible, de ne pas être exposé à la digitalisation de la communication. Qu’elle soit privée ou professionnelle, tous les acteurs des générations X, Y et Z se retrouvent pris entre ses filets … en tant qu’acteur et/ou consommateur.
Tous les secteurs sont concernés : l’actualité, le sport, la musique, la mode, le cinéma, etc…
Jusque-là, je ne vous apprends rien. Mais rassurez-vous, le but, ici, n’est pas de faire la leçon, mais d’ouvrir la discussion. Je me parle déjà bien assez souvent à moi-même, puisqu’il est important d’avoir l’avis d’un expert … ;-).
Plus sérieusement : il y a eu les vagues du Tsunami, le séisme au Népal, l’exode de la Syrie … tout comme Je suis Charlie. Coup(s) de crayon et de fusil. Sang et liberté d’expression. Sans modération.
Je dis sans modération, parce qu’il n’y a plus de segmentation (public-cible), plus d’heure de diffusion (ouverture 24/24 sur les réseaux sociaux) et plus de moyen de protection (interdit aux moins de 16/18 ans ou logo rouge comme au cinéma ou à la télévision) pour les contenus à caractère pornographique ou violent. Je ne parle même pas de la pudeur face aux événements ou de leur pertinence puisque ces éléments ont récemment fait l’objet d’une réflexion dans ma précédente chronique « Ad nauseam… In fine ».
Je parle tout simplement de la confrontation. Au(x) flux … à l’information … à l’intoxication.
Si, par exemple, quelqu’un qui vous est proche relaye et vous expose à une vidéo de « 26minutes », du « détecteur de mensonges pour enfants » ou de « Florence Foresti »… il y a fort à parier que vous allez passer un agréable moment et bien rigoler. Et si vous voyez le post tourner en boucle dans votre réseau, vous allez gérer, voire tout simplement ignorer.
Mais qu’en est-il lorsque quelqu’un de votre réseau ou un influenceur (journaliste, bloggeur, autre) partage la vidéo du dernier clip de Stromae ? (on a aussi vu passer le dernier bébé de Beyoncé, mais là rien de grave !). Qu’il commence à tourner, à tourner, sans que vous puissiez le stopper ? Que vous ne pouvez pas ignorer tellement ce fut terrible de l’écouter ?
Que vous pensez aux quelques amis et camarades d’université, partis trop tôt, parfois à une vitesse fulgurante et parfois longtemps après une lutte acharnée entre 20-45 ans ?
Vous avez les larmes aux yeux, le cœur serré et il vous est difficile de respirer. Chaque fois. Et chaque fois, vous entendez hurler dans le souvenir de votre tête « cancer, cancer ! ».
La liberté des uns s’arrête là où commence la liberté des autres. Jusqu’où va donc la liberté d’expression … jusqu’où un artiste peut-il aller sans être censuré ?
Selon le Figaro, le clip Quand c’est ? a totalisé plus de 6 millions de vues d’internautes à peine une semaine après avoir été lancé. Et il ne fait pas l’unanimité ; s’il est qualifié de mi-poison et de mi-antidote par le magazine Gala, les malades du cancer eux-mêmes ont exprimé des avis divergents à l’artiste sur Twitter.
Je suis de l’avis de cette jeune femme qui a écrit « le cancer a déjà gagné dans le clip. Pas comme je l’aurais voulu ». Premièrement, parce que dans la vidéo, dont il faut quand même saluer la perfection de mise en scène, de chorégraphie et de réalisation, la fatalité l’emporte. La lutte est perdue, alors que dans la vie – et heureusement ! – ce n’est pas toujours le cas. Je veux croire que les personnes en train de lutter, dont une en particulier, vont y arriver !
Ensuite, il y a quelque chose de hautement dérangeant dans les paroles également :
Cancer, Cancer … Dis-moi quand c’est…
Cancer, Cancer … Qui est le prochain ?
Faut-il vraiment qu’il y ait un prochain(e) ? Pourquoi cette programmation, ce rendez-vous pris ? Et avec ou pour quoi ?!?!!!
Si en marketing, on dit toujours que la marque et le message s’inscrivent avec la répétition, pourquoi en serait-il autrement avec les paroles de cette chanson ?! J’accorde une pensée toute particulière à la pensée positive, à la pensée créatrice, au pouvoir du subconscient et à la capacité de chacun à s’autoprogrammer. Volontairement ou involontairement. Dans la guérison, comme dans la destruction.
Raison pour laquelle je pense que la diffusion de ce genre de chanson devrait être mieux contrôlée. Encore plus quand personne n’a les moyens de protéger les enfants, les adolescents et autres âmes innocentes et sensibles de ce contenu toxique.
Tout à coup, ce sera là, dans une émission radio, dans un clip sur MTV ou MCM, sur YouTube … ou ailleurs sur les réseaux sociaux. C’est insidieux, non contrôlable, tentaculaire … c’est là et ça s’impose. Pour moi, c’est comme le cancer lui-même. Dévastateur.
Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. Et tant qu’il y a de l’espoir, il y a des possibilités. N’est-ce pas là le message le plus important à chanter, si le but est de sensibiliser ?
En tant que professionnels du marketing, de la communication, de la promotion … n’avons-nous pas aussi des responsabilités vis-à-vis de la société ?
Devons-nous tout cautionner sous prétexte d’avoir de l’audience et de la visibilité ?
A méditer …